Communications > Par intervenant > Martin Emilie

Issu de la théorie sociocognitive (Bandura, 1977), le concept de Sentiment d'Efficacité Personnelle (SEP) des enseignants fait référence aux croyances que se font ces derniers de leur capacité à accomplir avec succès les tâches liées à leur mission d'enseignement (Tschannen-Moran et al. 1998). Ce sentiment de compétence, qui se distingue du niveau réel de compétence, semble être positivement associé aux comportements et attitudes des enseignants dans la classe (Allinder, 1994 ; Guskey, 1988 ; Backer, 2005) et, par conséquent, aux performances scolaires de leurs élèves (Muijs et Reynolds , 2002).

L'objectif de cette présentation est de comprendre de façon plus détaillée la relation entre le SEP des enseignants et la réussite scolaire des élèves en analysant l'effet différentiel de plusieurs sous-dimensions du SEP des enseignants. Selon la théorie sociocognitive de Bandura (1977 ; 1986 ; 1997), le SEP ne doit pas être étudié comme un trait de personnalité général au même titre que l'estime de soi mais plutôt comme un concept spécifique et multidimensionnel susceptible d'évoluer en fonction du contexte et des expériences vécues. Dans le domaine scolaire, cela se traduit en analysant le SEP des enseignants en fonction d'une matière d'enseignement spécifique ou d'une tâche pédagogique particulière. En effet, un enseignant peut se sentir compétent dans l'enseignement des mathématiques mais pas du tout apte à enseigner les langues. De la même manière, il peut avoir confiance en sa capacité à maintenir la discipline dans sa classe mais ne pas se sentir capable de faire progresser les élèves en difficulté. Par conséquent, on peut se demander si le pouvoir prédictif du SEP des enseignants sur les performances scolaires des élèves est le même pour les différentes sous-dimensions du SEP.

Pour répondre à cette question, nous analyserons, dans un premier temps, l'effet du SEP des enseignants selon trois tâches d'enseignement spécifiques à savoir (a) la Gestion la Classe, (b) l'Engagement des Elèves et, (c) les Stratégies d'Enseignement. Ces dimensions seront mesurées en utilisant l'échelle de SEP des enseignants développée par Tschannen-Moran et Woolfolk Hoy (2001). Dans un deuxième temps, nous analyserons l'effet du SEP des enseignants selon une matière d'enseignement particulière à savoir l'enseignement des mathématiques. Pour cela, nous avons crée notre propre échelle qui mesure la perception que se font les enseignants de leur capacité à enseigner les mathématiques selon trois groupes de compétences: (a) les Nombres, (b) les Grandeurs, (c) le Traitement de Données.

Les données que nous utiliserons font partie d'une vaste enquête menée au sein des écoles secondaires de la Fédération Wallonie-Bruxelles au cours de l'année scolaire 2014-2015 sur un échantillon de 10.395 élèves de 2e secondaire, 598 classes, 388 enseignants et 103 écoles. Après avoir soumis les deux échelles de SEP à une analyse factorielle confirmatoire, nous analyserons les données sur base d'une analyse multiniveaux. L'intérêt de cette méthode est qu'elle permet de modéliser l'influence du SEP des enseignants tout en tenant compte des caractéristiques propres aux élèves et aux classes. Nous émettons l'hypothèse que le SEP des enseignants est significativement associé aux performances scolaires des élèves mais que les dimensions liées à l'enseignement des mathématiques sont celles qui auront l'effet le plus prononcé sur les performances des élèves dans cette même matière.